Dans le TGV, il suffit d’une formule magique pour faire couler l’eau !

 

Il y a des phrases que j’entends tellement souvent que je pourrais les deviner avant même qu’on me les dise. Parmi elles, la grande gagnante reste sans aucun doute :
« Monsieur, il n’y a plus d’eau pour se laver les mains aux toilettes ! »

Cette phrase, je l’entends plusieurs fois par semaine, et à chaque fois, elle m’arrache un sourire. Parce qu’au fond, elle symbolise parfaitement ce mélange de curiosité, de panique légère et d’incompréhension qu’on retrouve souvent dans le TGV. Oui, dans le TGV, il se passe des choses étranges, parfois drôles, souvent inattendues. Et l’eau des toilettes, c’est tout un art.

Je me suis fait une petite réputation dans le TGV avec ma fameuse formule magique. Quand un voyageur vient me voir, inquiet, les mains pleines de savon ou l’air dépité après avoir vainement tenté de déclencher le robinet, je lui dis en souriant :
« Vous avez bien prononcé la formule magique ? »

En général, il me regarde avec des yeux ronds. Alors, je l’accompagne jusqu’aux toilettes, je me place devant le lavabo, je tends mes mains sous le capteur et je lance solennellement :
« Abracadabra, que l’eau coule ! »

Et là, l’eau se met à couler.
Toujours.

Le voyageur me regarde, mi-soulagé, mi-étonné, et je ne peux pas m’empêcher de rire. C’est ma petite mise en scène préférée dans le TGV, et elle marche à tous les coups.

Ce qu’ils ne savent pas, c’est qu’il y a une astuce technique. Rien de sorcier, mais il faut la connaître. Sur certaines rames, le système de chasse d’eau et celui du robinet sont liés. Tant que la chasse d’eau n’a pas fini son cycle complet, le capteur du lavabo reste inactif. Il faut attendre le silence — ce moment où tout s’arrête — avant de placer sa main pile devant la cellule.
Trop près, ça ne marche pas. Trop loin, non plus. Il faut trouver la bonne distance, le bon geste. Un peu comme une danse.

Et puis, soyons honnêtes, ce n’est pas toujours simple. Entre les secousses du train, les capteurs parfois capricieux et les voyageurs pressés qui s’impatientent derrière la porte, les toilettes dans le TGV deviennent vite un petit terrain d’aventure.

Ce qui me fait rire, c’est de voir à quel point ce petit détail — l’eau du lavabo — peut transformer le voyage d’une personne. Il y a ceux qui s’en amusent, ceux qui râlent, ceux qui m’attendent à la sortie pour m’en parler avec conviction, et ceux qui me disent :
« Ah bah, il suffisait que vous veniez, ça remarche ! »

Comme si j’avais un don.
(Parfois, je les laisse le croire.)

Parce que quelque part, ce métier, c’est aussi ça : redonner le sourire pour un détail qui n’a l’air de rien. Créer un petit moment d’échange dans un espace impersonnel, où chacun vit sa bulle.
Dans ces moments-là, dans le TGV, on redevient humains. On partage un éclat de rire, un clin d’œil complice, une histoire à raconter plus tard.

Un jour, un enfant m’a vu faire ma « formule magique ». Il m’a regardé avec des yeux émerveillés et m’a demandé :
« Vous êtes magicien ou contrôleur ? »
J’ai souri et répondu :
« Les deux ! »

C’est là que j’ai compris qu’au-delà des billets, des contrôles et des annonces, mon rôle dans le TGV pouvait être un peu plus que ça. Un brin de légèreté dans le sérieux du trajet, un soupçon de magie dans la routine.

Parfois, on me demande si ce n’est pas lassant d’entendre les mêmes questions encore et encore.
Honnêtement ? Non.
Parce que derrière chaque question, il y a une personne différente, une expression unique, une réaction nouvelle. Et surtout, parce qu’au fil du temps, ces anecdotes deviennent la matière vivante de mon métier. Ce sont elles qui font que je ne m’ennuie jamais dans le TGV.

Chaque journée est différente, chaque trajet a sa petite surprise.
Parfois c’est une panne de Wi-Fi, parfois un passager qui s’endort dans le mauvais train, parfois… un robinet récalcitrant. Et moi, je suis là, au milieu de tout ça, à jongler entre la technique et le sourire.

Je me dis souvent que dans le TGV, on apprend à relativiser. Un robinet qui ne coule pas, ce n’est pas si grave. Mais si on peut en rire ensemble, alors le voyage devient tout de suite plus agréable.

C’est peut-être ça, finalement, ma plus belle mission : rendre le trajet un peu plus humain, une anecdote à raconter, un moment suspendu entre deux gares.

Et la prochaine fois que vous prendrez le train, si jamais l’eau ne coule pas, respirez, attendez la fin de la chasse d’eau, tendez la main au bon endroit et surtout… n’oubliez pas la formule magique.
On ne sait jamais, elle fonctionne peut-être vraiment.

 

Envie de découvrir d’autres lieux insolites, des bons plans famille, et nos coups de cœur du terroir ?
Inscris-toi à ma newsletter en cliquant ICI et reçois une dose de bonne humeur et d’inspiration directement dans ta boîte mail.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Auteur/autrice

n.jareno@reseauevaleo.com

Publications similaires