Les imprévus d’un TGV peuvent aussi donner le sourire

Une journée en TGV pas comme les autres

Il y a des voyages en TGV qui filent sans encombre, et puis il y a ceux où les imprévus s’enchaînent comme dans un film d’aventures. Ce jour-là, j’étais sur un Paris–Marseille, le soleil brillait, les voyageurs étaient détendus, le contrôle à bord s’était déroulé comme sur des roulettes. Bref, tout roulait, et moi aussi. Paris – Avignon TGV, c’est normalement 2h40, et je voyais déjà notre arrivée se profiler pile à l’heure. L’ambiance était si agréable que j’en étais presque à me dire que ce trajet allait être une promenade de santé.

Quelques minutes avant d’arriver à Avignon TGV, j’annonce notre arrivée avec le sourire. Et là… le train s’arrête net, en pleine voie. Une cliente vient me voir : “Que se passe-t-il ?” Vu l’horaire, je lui explique calmement qu’on doit être un peu en avance et qu’un autre train nous précède probablement encore en gare. Je contacte notre conducteur pour confirmer… mais sa réponse change le scénario : problème électrique. Rien de dramatique, mais de quoi retarder un peu notre arrivée. Il m’assure que ça va repartir rapidement. Et effectivement, peu après, nous reprenons notre route.

À peine le temps de souffler qu’un nouveau coup de fil tombe : en gare d’Avignon TGV, les pompiers interviennent pour un voyageur victime d’un malaise. Résultat, petit arrêt supplémentaire et un retard de 20 minutes. L’occasion pour moi de rester sur la plateforme, d’échanger quelques mots avec les clients, de plaisanter un peu pour détendre l’atmosphère. Parce que dans un TGV, on transporte des gens… mais aussi de l’humeur et des sourires.

Une fois repartis, je pensais pouvoir reprendre mon rythme habituel. Mais à peine arrivé à ma voiture, une cliente m’interpelle : sa valise a disparu. Très probablement un échange accidentel : les bagages étaient nombreux et presque identiques. Je lui explique la procédure, je préviens les autorités compétentes, et on enclenche les démarches. Dans un TGV, même si on ne peut pas toujours résoudre tout immédiatement, on peut au moins mettre les choses en route.

Je rejoins ensuite la voiture-bar, pensant pouvoir souffler… mais c’était sans compter sur le doigt de la barista. Une petite coupure, rien de grave, mais de quoi me transformer en infirmier improvisé. Désinfection, pansement, et un petit mot pour détendre l’atmosphère. Dans ce métier, on apprend vite à jongler entre les rôles.

Le temps file, et nous voilà déjà au départ d’Aix-en-Provence TGV. Sur la plateforme, une dame m’aborde. “À quelle heure arrivons-nous à Marseille ?” – “Dans dix minutes”, je lui réponds. Soulagement visible sur son visage. Je lui demande si tout va bien, et elle me confie qu’elle est en pleine crise d’angoisse. Pas le genre de conversation que l’on attend forcément en uniforme, mais c’est ça aussi, être à bord d’un TGV : savoir écouter et réagir.

Je lui propose de faire quelques respirations longues et profondes. Inspirer à fond, gonfler les poumons, puis expirer lentement jusqu’à vider tout l’air. Je reste avec elle, l’accompagne dans cet exercice simple mais efficace. Peu à peu, son souffle se calme, ses épaules se relâchent. Elle me remercie chaleureusement. Je lui confie que je connais bien cette méthode grâce au yoga que je pratique régulièrement. Elle me lance, mi-sérieuse mi-sceptique : “Vous voulez vous moquer de moi ?” – “Pas du tout”, je lui assure. Et c’est là qu’elle m’annonce qu’elle est sophrologue. Un joli clin d’œil du destin : deux mondes différents reliés par la respiration.

En arrivant à Marseille, je repense à cette journée. Rien ne s’est passé comme prévu, et pourtant, elle restera dans ma mémoire. Entre l’arrêt imprévu, l’intervention des pompiers, la valise égarée, la coupure soignée et la crise d’angoisse apaisée, ce trajet en TGV a été tout sauf monotone. On pourrait croire qu’un enchaînement pareil fatigue, et c’est vrai. Mais il nourrit aussi, parce que derrière chaque “incident”, il y a une rencontre, un échange, un petit bout d’humanité.

Je me dis souvent que mon métier, ce n’est pas juste de faire respecter les horaires ou de vérifier des billets. C’est d’accompagner les gens dans leur voyage, avec tout ce que cela comporte d’imprévu. Le TGV, c’est rapide, mais les émotions, elles, prennent leur temps. On peut y vivre en quelques heures plus de rebondissements qu’en une semaine dans un bureau.

Et puis il y a cette vérité que je retrouve à chaque fois : ce sont les imprévus qui créent les souvenirs. Les journées sans accrocs s’effacent vite, mais les voyages où il faut improviser, rire un peu, rassurer beaucoup… ceux-là restent gravés. C’est ce qui fait que, même après des années à bord des TGV, je continue à aimer ce métier. Parce que chaque trajet est une aventure, et que derrière les rails, il y a toujours une histoire à raconter.

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